Siaba a écrit :Attention, il y a d'énormes différences entre un tireur expérimenté dans le confort d'un stand de tir avec une arme propre et des cartouches bien préparées et le soldat qui se trouve sur le champ de bataille avec une instruction de tir sommaire, la fumée, les cris, les pertes autour de lui, une arme vieille ou sale.
Oui, tout à fait.

Bien sûr, les études que j'ai citées ont été réalisées à l'époque et sur les champs de tir habituels.
Un intervenant sur Napofig (je ne me souviens plus qui

) avait écrit : «
Pour une arme à chargement par la gueule de 18 mm, le chargement devient difficile au bout de 30 à 40 coups, pour une arme de 11 mm au bout de 4 à 5. Le temps de feu du fantassin est de 10 minutes avec les fusils à pierre. »
Il me semble qu'il y a 30 cartouches dans la giberne, alors à une moyenne de trois coups par minute…
ivaniv a écrit :… au bout d'une dizaine de tirs, il faut nettoyer systématiquement le bassinet et la batterie.
Oui, tout à fait,

mais aussi, et surtout, la lumière, c'est pourquoi la perte de l'épinglette était sévèrement punie.
Je respecte les reconstitueurs et j'ai des amis parmi eux, ainsi la lecture de documents d'époque à la lumière de leur vécu dominical permet de comprendre certaines choses.
Par exemple, le livre du général de Brack « Avant-postes de Cavalerie Légère », réédité récemment par LRT Éditions, est très instructif sur la réalité du tir.
Dans la réponse à la question : «
Quel soin devez-vous avoir pour vos armes à feu », il y a cette phrase : « Toutes les fois que vous tirez, passez l'ongle sur la pierre ; si cela ne suffit pas, battez-la bien légèrement avec le gros bout de la baguette ; mais songez que ce moyen use rapidement la pierre, et qu'il ne faut l'employer qu'avec modération. »
Peut-être faut-il passer l'ongle sur le tranchant de la pierre (le silex) pour ôter le noir de fumée qui s'y dépose et qui doit gêner (interdire ?) la production d'étincelles au coup suivant ? Si vous n'avez jamais manipulé d'armes d'époque et encore moins tiré, vous ne pouvez pas comprendre cette histoire d'ongle.
C'est pour ça que je recommande de s'imprégner des conditions de vie de l'époque pour comprendre les récits (comme l'histoire des blés faisant 1,8 à 2 mètres de haut).
À propos des « organes de visée » : il y a un point de mire sur les armes à feu française (soudé sur le guidon) et je présume qu'il en est de même chez les autres nations. Il me semble qu'il y en avait aussi un sur le « bourrelet » à la gueule des tubes des canons.
Euthanasor a écrit :D'autre part sous le 1er empire, les soldats n'étaient pas entraînés à viser.
Peut-être pas chez les Russes, mais chez les Français si (même dans la cavalerie), chez les Anglais aussi, bien sûr, et peut-être chez les autres nations.
Euthanasor a écrit :Il suffisait qu'ils soient sur une colline pour que 90% des tirs passent au-dessus de l'ennemi (et vice versa, ceux d'en bas tiraient aussi à l'horizontale).
Oui, tout à fait,

bien qu'il faille s'entendre sur le terme « colline ». C'est aussi valable pour l'artillerie.
Euthanasor a écrit :Les troupes plus aguerries (voltigeurs par exemple) étaient cependant capables de viser grosso modo, si ce n'est des individus, (pas d'organe de visée) au moins des zones des bataillons ennemis. Ce sont les Prussiens qui s'en sont rendu compte lorsque sous le feu français, ils se sont rendu compte de l'énorme proportion de sous officiers et d'officiers hors combat. En fait, tous ces "chefs" étaient situés quasiment au même endroit( aux extrémités du bataillon), ce qui n'avait pas échappé aux Français.
Je connais ce texte mais ce n'est pas comme ça que je l'ai compris, mais je me trompe peut-être.

Bon, enfin, je donne ma version : les Français (voltigeurs ou non) savaient viser, surtout après les années d'entraînement au camp dit de Boulogne (les voltigeurs et assimilés étant les meilleurs tireurs).
De tout temps les chefs et autres généraux ont été des cibles privilégiées, ça, je ne vous l'apprends pas. Tuer le chef (ou le capturer) c'est tuer l'âme de l'armée ennemie.
Dès son invention, l'arme à feu devient le moyen idéal de tuer les chefs, ceci sans risque pour les tireurs (ce sont les lâches décriés par Bayard) !
La guerre de Sept ans verra ce phénomène prendre de l'ampleur, d'ailleurs, en Amérique, les officiers anglais chercheront à ressembler à leurs hommes pour éviter d'être pris pour cible par les Insurgents.
Durant les guerres révolutionnaires, les Autrichiens ont « appris » aux Français (qui avaient « oublié » les enseignements de la guerre de Sept ans) à tirer sur l'encadrement :
- officiers,
- mais aussi sous-officiers
- et soldats servant de guide pour les changements de formation et les avances en ligne de bataille (c'est-à-dire plusieurs bataillons côte à côte).
- en ce qui concerne les musiciens (qui servaient à transmettre les ordres par les voies sonores) je n'ai pas de données historiques, mais peut-être que l'on prenait de préférence des jeunes pour justement éviter que les musiciens soient pris pour cible (la compassion était au moins aussi développée que de nos jours).
Donc, les tirailleurs français (voltigeurs ou non) tiraient sur l'encadrement ET comme l'encadrement encadre, c'est-à-dire se trouve autour de l'unité, les Prussiens ont constaté que les extrémités des unités subissaient plus de pertes du fait des balles destinées à l'encadrement qui touchaient les soldats du rang.
C'est juste mon explication.
Je ne pensais pas qu'il y avait encore autant de joueurs tactiques napoléoniens !
