belliludis a écrit :Ce n'est pas que je sois fainéant, mais vu le manque d'ergonomie des sites yahoo groups, oui, ça serait intéressant que tu copies le fil de discussion ici, oui, s'il te plaît

Très bien, c'est avec grand plaisir que je réponds à ta requête.
Je n'ai mis que ce qui nous intéresse ici (la manipulation des chiffres par Hughes, dénoncée par Jérôme Lavis) et je me suis permis de corriger les fautes (accentuation, etc.)

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Extrait de FIRE POWER du major général Hughes. C'est une étude sur l'attaque de Girard lors de la bataille d'Albuera.
« Fortescue et Oman affirment l'un et l'autre que, dans les rangs français, sur les 3000 hommes touchés un millier le furent par les canons et 2000 par la mousqueterie.
Le feu initial de l'infanterie française peut être évalué à 1200 fusils, alors que les Anglais opposaient 800 fusils placés directement en face de la colonne et 1300 fusils (des 650 files latérales réparties sur 2 rangs) soit un total de 2100 fusils.
Malgré un certain flottement dû à la mêlée, les Français réussirent à maintenir en bon ordre leur ligne de feu de la colonne. Les Anglais de leur côté ne pouvaient remplacer ceux des leurs qui tombaient. Vers la fin des combats, on ne compta plus que 600 fusils en état de tirer ; aussi peut-on admettre que la moyenne des fusils ayant tué au cours de cet engagement fut de 1350 pour les Anglais. Cette puissance de feu appuyée par 7 pièces au maximum permit d'infliger 3000 pertes aux Français, alors qu'un nombre équivalent de fusils français appuyés par le tir de 24 pièces, ne provoqua dans les rangs anglais que des pertes 2 fois moindres. On peut en déduire que dans l'ensemble, l'efficacité des armes anglaises fut nettement supérieure à celle des armes françaises.
Les 1350 fusils anglais mirent hors de combat 2000 Français, soit un taux de 1.5 par fusil tirant a 180 m ou moins. On sait qu'au cours de cet engagement, certains bataillons britanniques dépensèrent la totalité de leurs munitions, ce qui constitue un cas assez rare. En admettant que chaque homme ait tiré 50 coups, il faut en déduire que 2 % seulement des salves furent efficaces.
Les 3000 Anglais qui défendaient la crête perdirent 1500 hommes qui tombèrent sous les obus des 24 canons français et les balles de l'infanterie française, forte de 1200 armes. En considérant que 400 hommes soient tombés sous les obus, les salves françaises furent efficaces que dans une proportion de 1,3 %. La qualité des armes britanniques ressort très nettement de tout ceci. Nous voyons qu'elle a permis à des troupes britanniques inférieures en nombre dans une proportion de 2 contre 5 de remporter la victoire ».
… il appuie le fait que l'efficacité des feux anglais était bien supérieure.
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Réponse de Jérôme :
… je suis en désaccord avec Hughes et ses calculs. En effet il mélange deux choses pour les Français, mais pas pour les Anglais.
Les combats du Ve Corps à Albuera peuvent être séparés en deux affaires plus ou moins distinctes. Cela est tiré de Oman et Fortescue qui sont pourtant les mêmes sources que Hughes.
Ire Phase :
La division Girard monte a l'attaque suivie par la division Gazan. Celle-ci est arrêtée par la Division espagnole Zayas composée des Gardes Espagnoles. Zayas fut faiblement supporté par Ballesteros et Lardizabal.
Oman dit que les fronts de Zayas et de Girard étaient sensiblement les mêmes, ceci étant dû à la formation étrange des Français.
Un duel au feu se met en place entre la division Girard et Zayas. Ensuite la brigade Colborne entre en ligne et se déploie sur le flanc gauche Français délivrant des volées sur ce même flanc sans que les Français puissent vraiment répondre efficacement. À ce moment la division Girard est en combat contre Zayas (supporté par une batterie espagnole) sur son front et par Colborne (et une batterie KGL) sur son flanc. Elle ne sera sauvée que par l'intervention de Latour-Maubourg qui culbute Colborne.
IIe Phase :
Girard remplace sa division par Gazan, pendant que les Anglais remplacent Zayas par Houghton et Ballesteros par Abercrombie. Et le duel recommence jusqu’à ce que Soult se retire. Il semblerait quand même que le passage de ligne entre Gazan et Girard ne se soit pas bien passé et que les Français auraient fini en une grosse masse désordonnée (d'après Oman).
Les Anglais avaient 2 batteries en support, les Français, il semblerait possible qu’ils en avaient 4.
Maintenant si on regarde les pertes :
Division Girard : 1823.
Division Gazan : 1305.
Donc au total on trouve les 3000 hommes mentionnés par Hughes.
Pertes Anglo-Alliés
Division Zayas : 681
Division Lardizabal : 291
Division Ballesteros : 275
Brigade Houghton : 1044
Brigade Abercrombie : 390
Je n'inclus pas les pertes de la brigade Colborne puisque celle-ci fut essentiellement détruite par cavalerie mais à titre indicatif : 1413.
Donc les pertes Anglo-alliés furent de 2681. Ce qui est sensiblement plus que les 1500 annonces par Hughes.
En fait Hughes ne compte que les pertes anglaises dans son calcul et donc néglige totalement l'effet des troupes espagnoles dans le combat. Or, sans ces troupes espagnoles, Beresford aurait perdu. Le calcul est donc faussé.
Certes, même en incluant les Espagnols, les Français ont plus de pertes, mais il faut prendre en compte l'effet de la brigade Colborne et de son action sur le flanc, de même que l'effet possible du désordre des deux divisions françaises.
En bref je trouve que l'étude d'Albuera n'est pas du tout concluante pour ce qui est de considérer que les feux anglais sont si supérieurs.
À titre d'exemple inverse, on peut prendre la bataille de Salamanca :
Voici ce que dit Oman du combat entre la Division Ferrey et la division Clinton. Dans ce cas les Français défendent alors que les Anglais attaquent. Clinton était supporté par une batterie sur le flanc Français. Les pertes anglaises furent supérieures aux pertes françaises, d'après Oman, même s'il est difficile de dire avec exactitude qu’elles furent les pertes françaises. Celles anglaises furent de 1100 pour les deux brigades Anglaises. Mais celles-ci participèrent ultérieurement dans le combat contre Clausel.
En fait cet exemple est surtout pour dire que le feu anglais n'est pas si supérieur que cela au feu Français. Et que pour vraiment faire une étude complète il faut pouvoir séparer ce qui est circonstanciel (attaque de flanc, désordre etc.) de ce qui est intrinsèque.
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Jérôme Lavis