Bernard a écrit
"Non. Les officiers disposaient règlementairement de chevaux de bât."
Réglementairement sans doute mais la réalité était peut-être un peu différente.
Ainsi le règlement provisoire doit être apprécier pour ce qu'il est : une description de l'organisation de l'infanterie au moment même où débute les guerres de la révolution et de l'Empire. En 1792 la France vient de déclarer la guerre à l'Autriche et de proclamer la République. Pour autant l'armée porte encore l'uniforme blanc.et la fleur de lys voisine toujours au bas des retroussis aux cotés de symboles plus républicains.
Le train régimentaire d'infanterie tel que définit par le règlement provisoire reste donc emprunt des pratiques de l'ex-armée royale. La révolution qui permet désormais aux roturiers d'accéder à l'épaulette ne tient compte ni de la naissance ni de la fortune des officiers et si la solde d'un colonel (rebaptisé chef de brigade) lui permet de disposer d'un équipage de guerre, celle des officiers subalternes ne leur permet pas le même train de vie.
L'officier étant retenu par le devoir auprès de sa compagnie, s'il dispose d'un cheval de main ou d'un animal de bât, il doit alors trouver quelqu'un pour le conduire et s'en occuper. Les officiers issus de l'aristocratie s'attachaient autrefois les services d'un domestique. Les officiers sans fortune ne pourront faire de même.
- Une gravure contemporaine d'Albrecht Adam* représentant un fourgon durant la campagne de Russie est reproduit page 693 du livre d'Alain Pigeard « L'armée napoléonienne » paru aux éditions Curandera. Comme l'impose le règlement la bâche porte l’inscription de son affectation : « 106 ème régiment 1er bataillon ». La légende précise que l'équipage réduit à deux chevaux est conduit par un soldat du train des équipages.
- La même gravure est reproduite en pages 80 et 81 du hors série n°21 de la revue Napoléon 1er consacré à l'infanterie napoléonienne par Vincent Bourgeot et Alain Pigeard. Le texte qui l'accompagne est ainsi rédigé : « Il y a à la suite de l'armée des fourgons qui sont répartis dans le train des équipages ; au niveau d'une division, on compte un fourgon régimentaire d'ambulance, cinq pour les vivres et un pour la comptabilité. Pour chaque régiment il existe trois fourgons placés à la suite pour le transport de la caisse, des papiers, de la pharmacie et des malles des officiers et à coté des fourgons d'ambulance spécifiques ».
- Ce fourgon qualifié d'ordinaire est également représenté page 120 du hors série n°1 de la revue « Soldat » de Ludovic Letrun et Jean-Marie Mongin sous la dénomination de fourgon à bagages.
- Un fourgon semblable est enfin dessiné page 79 du volume 23 de la série « officiers et soldats de l'artillerie » édité par Histoire& collections, toujours de Ludovic Letrun et Jean-Marie Mongin. Au dessous on peut lire « Divers fourgons suivent les régiments de la Grande Armée, pour le transport des bagages des officiers ou des vivres ou encore les outils du parc. Ces fourgons sont attelés à 4 chevaux et conduits par deux soldats du corps ».
https://www.google.com/imgres?imgurl=ht ... QF6BAgCEAY
Ces quatre informations issues de deux sources différentes m'amènent à penser que :
- ils existent bien une ou plusieurs voitures affectées à chaque bataillon d'infanterie
- cette voiture ne peut être confondue avec le chariot de munitions type Gribeauval
- dénommée fourgon, il sert au transport des bagages
- ces bagages seraient bien ceux des officiers du bataillon
- un même fourgon présent à l'état-major du régiment est affecté à la même mission pour le personnel
officier et sous-officier supérieur qui le compose.
A raison de trois officiers par compagnie, dix huit par bataillon un fourgon suffira alors tout juste pour le transport de leurs bagages. On peut envisager que plusieurs fourgons soit dévolus à la tâche.
Les indications concernant la composition de l'attelage et la conduite de ce fourgon peuvent paraître contradictoires. Rien n'est moins sur car nous avons déjà vu s'agissant d'une même voiture (en l’occurrence la forge de campagne) qu'elle pouvait être attelée tantôt à deux tantôt à quatre chevaux et ce au sein d'une même unité. Concernant la conduite de l'attelage il faut avoir à l'esprit que le train des équipages fut créé le dernier après le train d'artillerie et du génie. Avant cela les équipages relevaient de sociétés privées puis des soldats du corps. L'accroissement du nombre de bataillons du trains des équipages correspondu sans doute à l'accroissement des effectifs de l'armée mais aussi au nombre et la diversité des missions qui leur furent progressivement confiés. Ainsi les fourgons d'abord confiés à des entrepreneurs privés puis à des soldats du corps furent-ils par la suite confiés aux conducteurs du train des équipages ? Cette hypothèse me semble raisonnable.
Je ne suis pas parvenu à retrouver le passage des mémoires dans lesquels un sous-officier subalterne récemment promu adjudant ou sous-lieutenant relate son plaisir à ne plus devoir porter son barda. Il pouvait désormais le déposer dans le fourgon prévu à cet effet. Peut-être un membre de ce forum pourra le retrouver ?
Bernard a écrit
J'ai découvert la différence entre un chariot à munitions et un caisson!
Chariot = transport en vrac.
Caisson = transport des munitions prêtes à l'emploi.
Le nouveau Larousse illustré dictionnaire universel encyclopédique édité en 1901 sous la direction de Claude Augé donne les définitions suivantes :
« - Charette : voiture à deux roues munie d'un brancard simple ou double et de deux ridelles dont on se sert pour le transport des fardeaux
- Chariot : voiture à quatre roues avec des ridelles ou une caisse, servant à porter des fardeaux.
Admin. Mili. Fourgon pour le transport des bagages, des munitions et des blessés. Chariot de batterie, sorte de voitures que les batterie traînent à leur suite et qui sert à transporter des outils, des objet de rechange, du harnachement ect.
- Caisson : grande caisse placée sur un train à quatre roues et destiné au transport des munitions de guerre. ENCYCL. Art militaire. Le caisson est est une voiture militaire fermée, destinée au transport de divers objets mais plus spécialement des munitions de campagne, à la suite des troupes. Pour éviter la dégradation il faut les arrimer avec des soins particuliers dont Gribeauval fut le premier à se préoccuper. Il fit substituer aux voitures de modèles irréguliers, dont on se servait pour porter séparément la poudre et les boulets, un caisson convenablement aménagé pour recevoir les munitions confectionnées. »
Ce qui distingue le caisson est donc la présence d'un couvercle qui en protégeant la poudre des intempéries permet le transport de « coups complets » immédiatement disponibles. L'aménagement intérieur de celui-ci, divisé en sections, permet de leur conserver leur intégrité en dépit des aléas du transport. De même la voiture fermée du génie transportant les outils munie d'un couvercle est appelée caisson.
Bernard a écrit
Donc 2 caissons à outils de type différent et un caisson à munitions.
A ce sujet je pense avoir tiré au clair le problème des voitures transportant les outils. Il en existe bien deux modèles :
- L'un est le chariot à ridelles destiné au transport des munitions d'infanterie mais chargé alors de 250 outils à pionniers divers que avons déjà évoqué l'an dernier.**
- L'autre voiture est un caisson, appelé par les uns caisson à outils et par d'autres caisson à gros outils mais comme indiqué précédemment il s'agit bien du même modèle.
Bernard a écrit
C'est pourtant bien indiqué noir sur blanc
Par la loi du 30 avril 1793 la convention avait cru régler la situation des femmes à l'armée. Dans les faits, ce sont les commandants en chef de chaque armée qui au travers d'un ordre du jour doivent rappeler les dispositions de la loi et l'adapter à la situation présente. J'ai déjà cité l'ordre du jour de Junot du 17 octobre 1807 concernant l'armée du Portugal. En 1797 le général Bonaparte lui même alors commandant l'armée d'Italie rendit une suite d'ordres du jour destiné à régler la situation des vivandières, des cantinières et des blanchisseuses.
- 8 germinal An V (28 mars 1797) « il ne sera souffert aux demi-brigades que le nombre de vivandières prescrit par le règlement de campagne... »
- huit jours plus tard, 16 germinal An V « il ne doit avoir à la suite des corps que le nombre de cantinières et de blanchisseuses fixé à l'ordonnance... »
- 21 fructidor An V « toutes les femmes resteront au dépôt hormis le nombre accordé par la loi qui devront être munies d'un nouveau brevet signé du général de division et scellé de son cachet au chiffre ».
Mais c'est en vain qu'il essaiera de limiter le nombre de femmes aux armée, nommé premier consul il prendra un nouvel arrêté toujours dans le même but****. Devenu empereur il ne semble pas être parvenu à être obéi de ces dames. C'est alors à Berthier de tenter d'y mettre bon ordre, sans plus de succès d'ailleurs.
C'est fou comme le grand homme ne parvenait pas à se faire obéir des femmes. non ?
*Albrech Adam est un peintre bavarois du XIX° siècle. Dessinateur attaché au bureau topographique de l'armée d'Italie, il participe en 1812 à la campagne de Russie au sein de l'état-major du IV° corps commandé par le vice-roi Eugène de Beauharnais. Il va alors croquer sur le vif des scènes de vie militaire qui constituent un fond documentaire parfaitement authentique. Il s'agit là et c'est assez remarquable pour être souligné d'une source primaire.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Albrecht_Adam
** Cette précision figure page 76 de la brochure du CCFH consacré à l'artillerie et au système Gribeauval ainsi que page 81 du livret n°23 de Soldat et officiers de l'Artillerie.
*** Le décret du 28 messidor An XII (17 juillet 1804) leur accorde l'accès gratuit aux hôpitaux militaires en temps de guerre au même titre que les soldats.
**** L'arrêté du 7 thermidor An VIII (26 juillet 1800) autorisait les corps à avoir à leur suite des vivandières et des blanchisseuses dont le nombre ne devait pas dépassé 4 par bataillon ou 2 par escadrons.