Les tirailleurs, quelles unités combattaient en tirailleur ?

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cruchot
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Les tirailleurs, quelles unités combattaient en tirailleur ?

Message par cruchot » Sam Août 09, 2008 9:15 pm

Le titre semble bien niais :oops: car on va me répondre :
- les troupes légères,
- les cies légères et voltigeurs.

Certes, mais je veux avoir un peu plus d'infos sur les "autres" celles qui selon le règlement ne devaient pas le faire. Exemples :

- les fusiliers de ligne français
- les grenadiers français,
- la moyenne garde (c'est l'ouverture)

En fait si j'ouvre ce sujet c'est que nombreuses de mes lectures sur les bataille de la période laissent une ambiguité, les troupes de Masséna à Essling, le 1er corps à Waterloo après l'attaque manquée, les troupes françaises à Sorauren.

Ma question est renforcée par les capacités Skirmisher, semi-skirmisher proposées par une règle comme Empire V. En plus la lecture de "l'etude des combats" D'ardant du Picq interpelle même si'il parle des troupes des armées postérieures quant à leur propension à se déployer en tirailleur.

Merci de vos avis
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Thierry Melchior
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Re: Les tirailleurs, quelles unités combattaient en tiraille

Message par Thierry Melchior » Sam Août 09, 2008 10:50 pm

cruchot a écrit :Merci de vos avis
Il n'y a pas de quoi. :-)
J'ai les mêmes lectures que toi, plus d'autres (et tu as sûrement lu des livres que je n'ai pas :-) ).
La réponse est claire : tous les combattants peuvent s'égailler dans la nature pour combattre ! ;-)
Ça, c'est la base, c'est de la survie en milieu hostile en quelque sorte (dans SBA, toutes les unités ont cette possibilité).
Après, intervient l'aptitude à « tirailler » qui peut-être plus ou moins développée par :
– l'entraînement en temps de paix (pas le plus efficace mais ne coûte rien en vie humaine) ;
– l'expérience du combat (très efficace mais coûteux en vie humaine).

Comme je l'ai écrit dans SBA, la liberté, l'égalité et la fraternité (aussi bien entre soldats qu'entre soldats et encadrement), donnent aux soldats plus de capacités à agir hors de tout cadre c'est-à-dire en tirailleurs (dans SBA, je différencie l'ordre lâche de l'ordre ouvert).

Les Prussiens avaient reconnu cette supériorité des Révolutionnaires français (Scharnhorst et un autre) et ont donc cherché à développer l'individualisme chez leurs soldats.

Finalement, en donnant plus de liberté et d'initiative aux soldats, c'est vraiment la guerre qui a semé les ferments de la révolte contre les monarchies dans toute l'Europe !

À te lire,
T.M.
« Quand les hommes ne peuvent changer les choses, ils changent les mots. »
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Korre
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Message par Korre » Dim Août 10, 2008 1:16 am

Il n'y a pas de quoi.
J'ai les mêmes lectures que toi, plus d'autres (et tu as sûrement lu des livres que je n'ai pas ).
La réponse est claire : tous les combattants peuvent s'égailler dans la nature pour combattre !
Ça, c'est la base, c'est de la survie en milieu hostile en quelque sorte (dans SBA, toutes les unités ont cette possibilité).
Oui, il me semble que de combattre de manière dispersée est la première forme de combat.
Historiquement les formations compacts demandent un degré de culture, de connaissance et d'organisation supérieure.
Mais pour rester "organisé" en formation dispersée, cela demande aussi et certainement beaucoup d'expérience.

cruchot
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Message par cruchot » Dim Août 10, 2008 11:25 am

Mais pour rester "organisé" en formation dispersée, cela demande aussi et certainement beaucoup d'expérience.
C'est une question qu'Ardant aborde à plusieurs reprise. L'utilisation efficace et "ordonnée" des tirailleurs avec le niveau de commandement et de discipline que cela impliquait.

La réponse est claire : tous les combattants peuvent s'égailler dans la nature pour combattre !
Ça, c'est la base, c'est de la survie en milieu hostile en quelque sorte (dans SBA, toutes les unités ont cette possibilité).
Merci de cette vérité. D'autant qu'à l'époque, l'ordre "Serrez les rangs" signifiait aussi qu'un boulet avait embarqué quelques piétons (pas très rassurant à la longue).
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Thierry Melchior
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Message par Thierry Melchior » Lun Août 11, 2008 10:43 am

Bonjour Cruchot :-)
cruchot a écrit :D'autant qu'à l'époque, l'ordre "Serrez les rangs" signifiait aussi qu'un boulet avait embarqué quelques piétons (pas très rassurant à la longue).
Oui, tout à fait, je ne discuterai pas de l'effet moral du boulet. :-)

Mes lectures (règlements et mémoires) m'ont amené à envisager une explication de l'ordre : « Serrez les rangs ! », qui ne correspond pas à ce que j'ai vu faire par certain groupe de reconstitution. :?
Un rang est composé d'un certain nombre de files, un homme occupant environ 50 - 51 centimètres.
Les rangs d'une sous-unité doivent être espacés d'une certaine distance, environ un pas.
Pour que l'unité puisse manœuvrer, le front de ses sous-unités ne doit pas changer ainsi que leur profondeur, c'est-à-dire l'espace entre les rangs.
Mais les rangs doivent également rester à un pas de distance pour que le premier rang se sente soutenu ! En effet, lors des affrontements la fuite débute toujours par l'arrière (les soldats faisant face à l'ennemi savent pertinemment qu'ils seront immédiatement pris de dos et « tiennent » donc plus longtemps).

Ci-dessous figure un peloton de 36 hommes sur 3 rangs de 12 files :
............
............
............

Oui, si un boulet frappe ce peloton il emporte une file, voire plusieurs (voire le rang) s'il est en enfilade.
....... ....

....... ....
       ;
.......;....
       ;

Un écart s'est fait, que s'est-il passé ?
Les cadavres tombés en travers gênent la progression du rang suivant et, surtout, occasionnent un instant de réflexion (« Je marche à la mort ») des soldats qui, instinctivement, ralentissent leur marche ce qui entraîne une augmentation de l'espace entre les rangs.
Il est évident que ce « ralentissement » des rangs n'existe pas dans la Vieille Garde et est très important chez les miliciens ! ;-)

Donc, quand un sergent crie : « Serrez les rangs ! », ce n'est pas pour que les files composant le rang se serrent – ce qui modifierait le front du peloton – mais bien pour que les rangs respectent l'espace qui les sépare !

Il est dommage que les reconstitueurs soient restés sur l'image hollywoodienne des files qui se serrent… :roll:

Rappel : le complément du ou des premiers rangs, voire d'un peloton complet, par le ou les derniers rangs se faisait à l'arrêt et nécessitait une réorganisation de l'unité d'où une perte de temps plus ou moins importante en fonction des pertes et de l'entraînement de l'unité, voire de son moral.
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BMasson
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Message par BMasson » Jeu Août 14, 2008 6:55 pm

je pense que la question ne doit pas être de la présence ou non d'aptitude à combattre en tirailleurs (à part sous la révolution avant l'amalgame), mais d'entrainement à la "petite guerre", et surtout de volonté au niveau de l'encadrement régimentaire ou inférieur, car déployer des tirailleurs, c'est perdre un certain niveau de contrôle sur "ses" soldats.

Va-t-on les retrouver, vont-ils déserter/s'enfuir/apprendre à se débrouiller tout seuls (sans leurs officiers), leur absence dans l'unité ne sera-t-elle pas plus négative que l'apport de leur écran, n'est-ce pas s'abaisser et/ou les avilir que de leur faire quitter le rang...

sans compter qu'il est rare que le commandant d'un écran de tirailleurs soit à même de se faire remarquer de son supérieur!

comme toutes les caractéristiques du soldat, c'est aussi très variable au fil du temps, et selon le recrutement de l'unité, un ancien chasseur de Reiche en 1815 n'est pas équivalent avec un voltigeur conscrit en août 1813 recruté dans le département Français de l'Ems-Supérieur (préfecture Osnabrück)...

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Message par grand maréchal » Jeu Août 14, 2008 7:21 pm

:D Bien écrit "Thierry Melchior"

Quand un sergent dit :
-Serrez les rangs
cela ne veut pas dire
-bouchez les trous
et c'est vrai que certain en font une erreur monumentale.

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Thierry Melchior
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Message par Thierry Melchior » Jeu Août 14, 2008 8:10 pm

Bonjour Bruno :-)

Tu as raison et je suis bien d'accord avec tout ce que tu as écrit. :-)
BMasson a écrit :je pense que la question ne doit pas être de la présence ou non d'aptitude à combattre en tirailleurs (à part sous la Révolution avant l'amalgame), mais d'entraînement à la "petite guerre", et surtout de volonté au niveau de l'encadrement régimentaire ou inférieur, car déployer des tirailleurs, c'est perdre un certain niveau de contrôle sur "ses" soldats.
Peut-être ai-je été trop péremptoire et trop bref dans mon explication, mais ce que tu as écrit revient au même. :-)

Je n'ai fait que reprendre des explications données dans des messages sur le forum de « Napoleon Series », explications étayées, notamment, par des extraits d'écrits d'officiers allemands dont Scharnhost.
Pour moi, l'aptitude à tirailler c'est l'autonomie, l'initiative, mais aussi l'idéal révolutionnaire qui va faire que le tirailleur français ne va pas déserter comme le faisaient les tirailleurs du Grand Frédéric !
Les officiers français ne craignent donc pas de perdre le contrôle de leurs hommes (surtout que lieutenants et capitaine ne sont pas loin derrière). :-)

Tu dis « l'entraînement à la " petite guerre " », j'ai dit « l'entraînement au combat en tirailleurs », pour moi nous disons la même chose. :-)
BMasson a écrit :Va-t-on les retrouver, vont-ils déserter/s'enfuir/apprendre à se débrouiller tout seuls (sans leurs officiers), leur absence dans l'unité ne sera-t-elle pas plus négative que l'apport de leur écran, n'est-ce pas s'abaisser et/ou les avilir que de leur faire quitter le rang...
Tu as raison ! :-)
C'est bien toute la problématique exposée par Scharnhorst (et d'autres), et c'est bien pourquoi il disait qu'il serait très difficile d'arriver au niveau des Français. :-)

Les corps francs puis les troupes de la guerre de Libération (1813) vont faire de bons tirailleurs justement parce qu'ils arrivent à un certain idéal patriotique, idéal qui ne nécessite plus de surveiller les hommes mais de les employer au mieux. :-)

Ton intervention complète utilement la mienne en montrant la « vraie et principale » différence (à mon humble avis) entre les armées de métier de l'Ancien Régime et les armées issues de la Révolution française ou de l'éveil nationaliste (à partir de 1808 - 1809 pour l'Autriche et la Prusse, de 1812 pour la Russie).

À mon humble avis, il y avait sûrement plus de tirailleurs (je parle en terme de quantité pas de qualité) chez ces nations que dans l'armée anglaise. ;-)

Amicalement,
Thierry.
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cruchot
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Message par cruchot » Sam Août 16, 2008 4:32 pm

Pour compléter vos avis, AMHA, dans une armée comme l'armée française sauf peut-être en 1813-1814, sous certaines réserves, une unité qui avait subi des pertes substantielles avait tendance à continuer le combat en tirailleur ("on se disperse, on s'éparpille") surtout face à un adversaire statique.

Cette situation se retrouve dans les relations de bataille sous la phrase laconique "les combats dégénérèrent en un affrontement de tirailleurs qui dura jusqu'à ....."
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Thierry Melchior
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Message par Thierry Melchior » Sam Août 16, 2008 5:20 pm

Oui, tu as raison, c'est exact. :-)
C'est pour ça que c'est le dernier bataillon frais, c'est-à-dire formé, qui gagne, car il repousse les tirailleurs (restes des bataillons ennemis). :-)
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Korre
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Message par Korre » Ven Août 22, 2008 10:09 pm

Pour information :
Line Infantry
grenadier - 170.25 cm
fusilier - 164.5 cm
voltigeur - 159.5 cm

Light Infantry
carabinier - 168.25 cm
chasseur - 163 cm
voltigeur - 158 cm
Trouvé ici :

http://napoleonistyka.atspace.com/French_infantry.html


Je n'arrive plus à trouver le débat où quelqu'un a dit qu'il n'y avait de différence de taille entre les légers et la ligne.

Je mets ici, ça colle avec le débat. Il ya une différence d'un 1 ou 2cm. La différence entre la ligne et la légère, est ... très "légère" !

Avec son mètre 69, Napoléon aurait pu être dans les carabiniers d'une unité ! :wink:

Chasseur Patatra
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Message par Chasseur Patatra » Sam Août 23, 2008 9:02 pm

Laissons le Maître s'exprimer sur le sujet :


Tiraillement dans le 1er corps d'armée commandé par le maréchal Davout en 1811.

Il apparait que le général de divison Charles Antoine Louis Alexis Morand est l'auteur d'une instruction, qui en septembre 1811 servait de base pour l'entrainement de tous les tirailleurs de ce corps d'armée. Le maréchal Davout écrira:

Au général Morand. Hambourg, le 16 octobre 1811.
J'ai reçu, mon cher Général, votre lettre du 16 et les 5 expéditions de votre projet pour apprendre à toutes les troupes le service des tirailleurs, il m'a paru parfaitement remplir cet objet et je les adresse à tous les généraux commandants les divisions d'infanterie, avec invitation de profiter du reste de la saison pour y faire exercer toutes les compagnies; et vous remercient, mon cher Général, je vous prie addresser une expédition de ce projet, dont vous aurez certainement conservé une minute à vos généraux, et colonels, en leur prescrivant de s'y conformer et d'y exercer de suite les troupes.
Les compagnies de voltigeurs devant avoir déjà connaissance des manoeuvres, il sera bon d'exercer les premières fois avec elles les compagnies du centre; c'est à dire une de chaque, et mélant les fusiliers avec les voltigeurs.
Je vous serai obligé de me faire connaitre les mesures que vous aurez prises, et les progrès des troupes dans ces exercices, qui ne peuvent que développer l'intelligence des soldats et même des officiers, en faisant faire sur différent terreins.

Le même jour, l'instruction suivante fut envoyée aux autres généraux commandants des divisons du 1er corps d'armée:

Aux généraux: Friant, Gudin, Dessaix, Compans et Barbanègre.
Hambourg, le 16 octobre 1811.
On a reconnu généralement qu'il etait nuisible de prendre un certain nombre d'hommes par compagnie, pour flanqueurs et tirailleurs, et qu'il était préférable de prendre des compagnies entières.
Les compagnies des voltigeurs qui sont des compagnies d'élite, ne peuvent sans souvent de graves inconvénients faire ce service, il m'a donc paru convenable que les compagnies qui peuvent être dans le cas de faire ce service, y soient éxercées.
Comme il est important pour mettre de l'uniformité, qu'il y ait des bâses d'adoptées, je vous adresse, mon cher General, un résumé de manoeuvres, aux quelles je vous invite â faire exercer les régiments sous vos ordres, soit d'infanterie légère ou d'infanterie de ligne. Je désire que l'on profite de la saison actuelle pour y faire exercer les troupes.
Faites faire de suite une expédition de cette instruction pour chacun des Colonels des régiments sous vos ordres et pour chacun général de brigade; recommandez du reste qu'il n'en soit pas fait plus de copies.
Les compagnies des voltigeurs devant avoir déjà des connaissances de ces manoeuvres, il sera bon d'exercer pour la premiere fois les compagnies du centre avec les compagnies de voltigeurs, c'est dire un de chaque, en mêlant les fusiliers avec les voltigeurs.
Je vous serai obligé de me faire connaître les mesures que vous aurez prises, et les progrès des troupes dans ces exercices qui ne peuvent que développer l'intelligence des soldats et mêmes des officiers, en les faisant sur différents terreins.
(Au général Dessaix) Il sera inutile, mon cher Général, que vous en-voyez copie de cette instruction au 33e léger, attendu que j'en envoie copie au général Barbanègre, pour qu'il lui en remette une expédition.


Manoeuvres pour une compagnie de Tirailleurs ou de Flanquers.

La compagnie designée pour éclairer une colonne ou couvrir une ligne, se portera aussitôt que son capitaine en aura reçu l'ordre, à 200 pas [130 m] de la ligne ou de la colonne; arrivée au centre de l'espace qu'elle doit couvrir ou éclairer, le capitaine l'arrêtera et formera la ligne des tirailleurs de la manière suivante.
Article 1er
Couvrir la tête dune colonne ou le front d'une ligne.

Le capitaine de la compagnie des tirailleurs, ayant fait halte au point où la section de réserve doit demeurer, divisera sa compagnie en 3 sections et commandera:
Sections de droite et de gauche, par le flanc droit et le flanc gauche, à 100 pas [65 m] sur la droite et la gauche – marche.
A ce commandement, les lieutenants se mettront en marche avec leurs sections. Le sergent major, deux sergents, deux caporaux, deux tambours ou cornets, (s'il y en a 4 dans la compagnie) demeureront avec le capitaine à la section du centre.
Les lieutenants arrivés à 100 pas [65 m] sur les points de droite et de gauche où ils doivent s'arrêter, feront faire halte à leurs sections et commanderont, savoir:
Le lieutenant, chef de la section de droite.
1. Premier et second rangs par le flanc gauche – gauche.
2. À 15 pas [9,75 m] par file, prenez vos distances – marche.
Le sous-Iieutenant, chef de la section de gauche.
1. Premier et second rangs par le flanc droit – droit.
2. À 15 pas [9,75 m] par file, prenez vos distances – marche.
A ce commandement, les files des deux premiers rangs des séctions de droite et de gauche prennent leurs distances à 15 pas [9,75 m] et marchent jusqu'à ce qu'elles se rencontrent.
Le 3e rang, le sergent, les caporaux, un tambour ou cornet, demeureront en reserve avec I'officier.
Remarque.

Ces réserves doivent fournir des remplacements à Ia ligne, des renforts aux points attaqués fortement, et aux officiers des escortes qui ne doivent jamais les quitter: ces escortes destinées à servir de points de raliement et de retraite, devront être de 6 hommes, au moins.
Si un sous-officier est détaché pour porter des ordres aux tirailleurs, il devra toujours être accompagné d'un fusilier tiré des réserves.
Les distances étant prises, les lieutenants feront battre le pas ordinaire ou sonner la marche.
A ce signal, les files de tirailleurs se portent à 100 pas [65 m] en avant.
Remarque.

Les tirailleurs doivent toujours marcher deux ensemble afin de se secourir mutuellement. Ils ne doivent faire feu que l'un après l'autre, de manière que l'un des deux demeure toujours chargé.
Autant que possible, la ligne des tirailleurs couvrant la tête d'une colonne, devra décrir une portion de cercle dont la tête de la colonne serait le centre.
Article 2.
Couvrir la queue d'une colonne ou la retraite d'une ligne.

Mêmes dispositions qu'à l'article premier.
Remarques.

Dans Ia retraite d'une ligne, le cordon des tirailleurs devra se maintenir parallèle â la ligne.
Le capitaine d'une compagnie de tirailleurs ne doit jamais perdre de vue la colonne ou la lignie: dans le cas oû le terrein l'empêcherait de l'appercevoir, il placera des sous-officiers ou soldats, de manière à le tenir averti de tous ses mouvements.
Le pas des tirailleurs se règle sur celui de la colonne ou de la ligne.
Article 3.
Couvrir un seul flanc de la colonne.

Mêmes dispositions qu'à l'article 1er.
Remarque.

Le cordon des tirailleurs étant établi, marchera par le flanc ainsi que les réserves en suivant la direction de la colonne.
Article 4.
Couvrir avec une seule compagnie les deux flancs de la colonne.

La capitaine divisera la compagnie en deux section et commandera:
1. Première section, en avant sur le flanc droit de la colonne – marche.
2. Deuxième section, en avant sur le flanc gauche de la colonne – marche.
A ce commandement, le sous-lieutenant se portera avec la 1ère section sur le flanc droit de la colonne à 100 pas [65 m] environ.
Le lieutenant avec la 2-e section, à la même distance sur le flanc gauche.
Le capitaine suivra la mouvement de l'une des deux sections, accompagné de son sergent-major, d'un sergent, deux caporaux, dix fusiliers et d'un ou deux tambours ou cornets.
Les sections arrivées à 100 pas [65 m] de la colonne, seront arretées et fermées en ligne de tirailleurs de la manière prescrite à l'articIe 1er.
Remarque.

Des flancs de la colonne étant ainsi couverts, le capitaine se portera avec son escorte sur les points les plus menacés, d'oû il enverra ses ordres à ses lieutenants, soit par un sergent de son escorte, soit par le moyen des batteries ou sonneries.
Article 5.
Changements de direction.

Aussitôt que les officiers de tirailleurs appercevront un changement de direction de la colonne ou de la ligne, ils en previendront les tirailleurs par le moyen des sonneries ou batteries, et en envoyant des sous-officiers pour porter leurs ordres et s'assurer que le mouvement s'éxécute, ils devront se porter au point sur lequel le changement de direction s'opérera.
Article 6.
Changements de front.

L'un des lieutenants se portera au pivot sur lequel se fera le changement de front, et fera sonner ou battre jusqu'à ce qu'il voye que le mouvement des tirailleurs s'opère ainsi qu'iI est prescrit.
Tandis que le capitaine qui se fera porté avec sa réserve à la nouvelle place qu'eIIe devra occuper, s'assurera par ses sous-officiers de l'éxactitude et de la régularité du mouvement, l'autre lieutenant soutiendra avec son escorte l'aile qui se portera en avant.
Article 7.
Marche.

Non seulement les tirailleurs devront être éxercés au pas ordinaire et au pas accéléré; mais ils devront encore l'être au pas de course, car c'est à la course qu'ils devront faire les changements de direction, de front, et la charge pour enlever un bois, on village, et toutes les positions oû ils n'ont pas à craindre d'être chargés par la cavalerie.
C'est aussi à la course qu'ils devront se replier sur la peletons de réserve, leorsque la cavalerie se présentera pour les charger, à moins qu'ils ne puissent se cacher dans un trou, un fossé, une haye d'où ils pourront tirer sur elle avec sécurité.
Dans les plaines, les tirailleurs devront marcher dans le plus grand ordre avec calme, sang froid et silence; ménager leurs feux et se tenir prêts à éxécuter tous les mouvements qui leur seront ordonnés.
Quand on place des tirailleur sur les flancs en tête ou en queue d'une colonne marchant dans une plaine découverte, on à pour motif non seulement d'être averti des mouvements de l'ennemi; mais encore de tenir les tirailleurs d'infanterie et de cavalerie assez éloignés pour que leurs bases n'arrivent pas à la colonne.
Si la plaine à travers laquelle la colonne s'avance est sillonée de ravins et présente de petites colines ou des bouquets de bois, les tirailleurs devront entrer dans les ravins les fouiller, gravir les sommets des mamélons, tourner et fouiller les bouquets de bois.
Si l'on rencontre une maison, un château, une chaumière, le capitaine enverra une escorte suffisante pour les fouiller, et s'il y a lieu de penser que l'ennemi s'y trouve, il fera prévenir sur le champ le commandant de la colonne, resserera sa ligne, et prendra toutes les précautions nécessaires pour n'être pas surpris ni accablé par une attaque brusque.
Si les tirailleurs doivent traverser un village, le capitaine marchera en dehors avec sa réserve et prendra un poste avantageux jusqu'a ce que les tirailleurs aient fouillé le village dont il fera occuper les avenues principales par ses lieutenants et leurs escortes afin que les tirailleurs puissent se retirer sur eux en cas de besoin.
Si les tirailleurs marchent dans les bois où dans terrein coupé de fossés, couvert de haies, de ruines, etc. il ne devront s'avancer qu'avec les plus grandes précautions, s'embusquer s'ils rencontrent l'ennemi et profiter de tous les accidents qui se présentent pour prendre sur lui la supériorité et le forcer à leur abandonner le terrein.
Si l'ennemi s'est embusqué, il faut le tourner, quelques braves en s'éclançant sur le sommet d'un rocher, d'une rouine ou d'un retranchement, ou en franchissant un fossé derrière lequel l'ennemi, se croyait en sureté, ont presque toujours réussi à le débusquer et à lui faire éprouver une perte considérable.
En s'avançant, les officiers de tirailleurs doivent porter leur attention, non seulement sur les mouvements de l'ennemi et de leurs troupes, mais encore observer avec soin les formes du terrein dont ils peuvent tirer parti dans le cas d'un combat de pied ferme ou d'une retraite, et remarquer les ressources qui s'offrent, soit pour jetter de petits ponts, soit pour se retrancher à la hâte, s'il en était besoin.
Article 8.
Manoeuvres de tirailleurs pour l'attaque d'un village ou d'un retranchement.

On soppose une ligne de tirailleurs soutenue par ses réserves et dans l'ordre qui à été décrit plus haut, s'avançant de front à l'attaque d'un village, d'un retranchement, d'une ferme, d'un bois, d'un mamelon etc.
Il est probable que l'ennemi attaqué sur toute l'étendue de son front, se déploiera autant que possible pour offrir partout une résistance égale, mais si le commandant des attaquants s'est fait deux bonnes réserves et s'il donne le signal à ses tirailleurs de s'élancer à la course vers les deux extrêmités de la ligne, pour attaquer avec impétuosité les flancs et les derrières de l'ennemi, tandis qu'il lançera one réserve sur le front que l'ennemi aura naturellement dégarni, pour envoyer au secours de ses flancs attaqués; il n'y a point de doute qu'il obtiendra un succés complet. La deuxieme réserve, ne devra marcher qu'au pas, et ne s'engager qu'autant qu'il serait nécessaire pour soutenir la premiere aux prises avec l'ennemi.
La même attaque peut s'éxécuter par des réserves sur les flancs de l'ennemi pendant que les tirailleurs après s'être réunis à la course sur le centre, attaqueront vivement le front de l'ennemi.
Remarque.

On ne saurait trop exercer les tirailleurs à se porter à la course du centre de la ligne aux extrêmités, et des extrêmités au centre.
Cette manoeuvre peut procurer de grands avantages dans une foule de circonstances; elle doit être étudiée avec soin par les officiers.
Article 9.
Formations contre la cavalerie.

Les réserves de tirailleurs doivent toujours marcher avec le plus grand soin et se tenir prêtes é se former en cercle.
Si la réserve étant en ligne, la cavalerie se présente brusquement, l'officier commandera:
1. En arrière à droite et à gauche, formez la cercle – marche.
A ce commandement, les ailes de droite et de gauche marcheront en arrière jusqu'à ce qu'elles se rencontrent.
Si la réserve est en colonne, l'officier commandera:
2. Serrez la colonne – marche.
A ce commandement, les sections serreront en masse, les files de droite et de gauche feront face é l'ennemi. Les tirailleurs de la ligne qui rentreront, seront placé sur les angles de la colonne.
Article 10.
Passage des lignes ou remplacement des tirailleurs.

Si le capitaine juge à propos de remplacer la section qui forme la ligne des tirailleurs par celle qui forme la réserve, il enverra successivement de sa rézerve des hommes qui iront prendre la place des tirailleurs et raliera é lui ceux qui auraient été remplacés.
Les lieutenants veilleront à ce que ces remplacements se fassent avec ordre, précaution et intelligence.
Remarque.

Les officiers et sous officiers qui commandent les petites réserves où escortes, devront veiller avec soin à ce que la Iigne des tirailleurs marche dans le plus grand ordre, et dans la direction ordonnés; ils doivent éxciter l'elan dans les chairges et les marches précipitées, soutenir le pas et le ralentir autant qu'ils le jugent utile dans la retraite, arrêter la ligne quand ils et reçoivent l'ordre empêcher que les soldats ne quittent leur poste pour emporter les blessés; le capitaine devant seul donner des ordres pour ce service.
Article 11.
Signaux.

Mouvement. Sonneries. Batteries.
Déployement. Déployement. La Breloque.
Ralliement. Ralliement. Aux Drapeaux.
Retraite. Retraite. Retraite.
Marcher à droite. Marche à droite. La Grenadière.
Marche à gauche. Marche à gauche. Les trois coups de charge.
La charge. La charge. La charge.
Marche lente. Pas ordinaire. Pas ordinaire.
Marche précipitée. Marche précipitée. La Charge avec roulement.
S'arrêter. La Messe. La Messe.

Nota.

On a désigné pour les tirailleurs les batteries dont on fait le moins d'usage dans une colonne en marche afin d'éviter toute confusion entre les mouvements de la colonne et ceux des tirailleurs: on pourra donner aux tambours-majors l'ordre de ne faire battre la grenadière ni les trois coups de charge tant que la colonne sera flanquée de tirailleurs.
Les sonneries et batteries ont été choisies parmi celles de l'ordonnance pour qu'elles soient générales.
Cette instruction de Morand pour les tirailleurs, dont John Cook a fait la transcription, fut préservée, parce-qu'elle fut capturée avec le reste de la correspondence du maréchal Davout pendant la campagne de Russie en 1812. Elle se trouve imprimée sur les pages 6-11 d'un œuvre publié en 1903 à St. Petersburg par V. I. Charkevitscha: "Materiaux des Archives Éducatifs Militaires de l'État-Major. La Guerre Patriotique de 1812. Part II: Documents capturés de l'Ennemi. Volume 1: La Correspondence en Partance du Maréchal Davout (du 14 octobre au 31 décembre 1811.)" – malheureusement il n'est paru que ce seul volume.

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Thierry Melchior
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Message par Thierry Melchior » Sam Août 23, 2008 9:20 pm

Bonjour Chasseur Patatras ;-)

Je connais ce texte, il est sur Internet, j'ai même mis un lien quelque part sur le forum ! :-)
Mais tu le connais peut-être :
http://www.demi-brigade.org/indexfr.htm

Vive les Cosaques du Bandolou ! ;-)

Amitiés,
Thierry.
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Message par cruchot » Sam Août 23, 2008 9:58 pm

Bonjour Chasseur Patatras

merci pour ces textes que je ne connaissais pas mais dont finalement flairais l'existence. 1811 c'est bien tardif !!

Pour un peu regrouper le sujet sur le thème une dernière question :

Quelles sont les règles qui permettent les tirailleurs au sens large ?

Déjà identifiées :

Empire V, SBA de Thierry, "les Aigles V3"


Un doute :

dBN, "pour l'empereur" VV,
out par conception :

Napoleon's battles ( :? ) , tactique, "la grande armée" VV,
Dernière édition par cruchot le Dim Août 24, 2008 2:20 pm, édité 1 fois.
"Il est tout aussi impossible de décrire une bataille que de décrire un bal" Wellington

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Message par patrice kedzia » Dim Août 24, 2008 5:38 am

Bonjour Cruchot,

je te confirme que les aigles v2 et v3 permettent l'utilisation du tirailleur au sens large.
La v3 complète et éclaircie les dispositions de la v2.
Les tirailleurs restent et demeurent un problème, car si nous voyons que passer une compagnie en tirailleur n'est pas aussi simple, la réintégration d'une compagnie déployée en tirailleur au sein de son bataillon reste et demeure encore difficile.
La notion de réserve est déjà prévue dans les aigles, car il est déconseillé d'avoir plus des 2/3 de son bataillon en tirailleur.
Reste et demeure que des tirailleurs restent redoutables au feu, mais qu'ils sont bien vulnérables face à de la cavalerie ou d'unités en masse qui cherchent le contact.
Toutefois, l'emploi du tirailleur reste bien limité aux unités d'infanterie légère, et aux cies d'élites( et encore pas toutes).
Comme la lecture de ce texte le précise, l'ordonnance concerne bien une unité qui déploie une de ces compagnie en tirailleur, avant d'être engagée dans la ligne de bataille, en aucun cas il ne peut s'agir d'une ordonnance applicable à portée de fusils.
Il est prévu par la suite au niveau de la FFLA, de produire une fiche technique spécifique au combat et à l'utilisation du tirailleur sur la table de jeu. Mais Rome ne c'étant pas faite en un jour, le délai de réalisation de cette fiche demeure encore incertain.

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